Octobre Rose, il serait simple d’en faire un peu plus ...

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Revoilà l’époque d’Octobre Rose, initiative louable qui consiste à communiquer, pour prévenir et mieux combattre ensemble le cancer du sein… Tout le monde s’associe à cette démarche, on ne trouvera aucun élu qui ne se l’approprie pas …  Mais, mieux encore que communiquer, il est nécessaire d’agir…
Ainsi, lorsque j’étais député, je me souviens avoir interpellé dans l’hémicycle Roselyne Bachelot, alors Ministre de la Santé, parce qu’elle était capable d’arborer un ruban rose à sa boutonnière en faisant publicité pour Octobre Rose et en donnant des leçons à tout le monde, tout en ayant rendu, à la même époque, payante la possibilité de voir archiver ses radios médicales, après examens … Ce qui empêchait la traçabilité du parcours de soin, en particulier pour les personnes les plus pauvres. Obtenir ces radios devenait payant, certes pour une somme modique, mais dissuadait les personnes les plus pauvres de le demander. Ce qui ouvrait la porte une fois de plus à une médecine à deux vitesses. Roselyne Bachelot, Ministre de Nicolas Sarkosy, n’était déjà pas à une contradiction près …

Et puis, il y a une vingtaine d’années, j’avais essayé d’estimer parmi les personnels femmes travaillant à la mairie de Tomblaine (110 femmes) le nombre d’entre elles qui avaient eu un cancer de sein, voire même qui étaient en cours de traitement. Le résultat était impressionnant : plus de 15% d’entre elles…

Considérant que le cancer du sein chez la femme est le cancer qui se guérit le plus s’il est dépisté à temps, j’ai alors proposé que toute femme travaillant à la mairie de Tomblaine puisse se libérer sur son temps de travail, sans perte de salaire, pour un congé exceptionnel, chaque fois qu’elle doit aller passer un examen préventif. Cette nouvelle a été adressée à l’ensemble des personnels par courrier joint aux feuilles de salaires. Ainsi tout le monde a reçu cette info : des femmes qui avaient eu le cancer de sein, des femmes qui ne l’avait jamais eu, des femmes en cours de traitement et donc en arrêt maladie (elles ont donc reçu cette information avec leur feuille de salaire, et l’ont vécu comme une marque d’attention et de bienveillance), mais aussi les hommes (on ne parlait pas du cancer du sein chez les hommes qui représente tout de même 1 % des cancers du sein, mais qui ne se dépiste pas et ne se soigne pas de la même façon). Il était important de communiquer aussi auprès des hommes, car lorsqu’une femme est atteinte du cancer du sein, son entourage est concerné, le compagnon, le père, l’enfant, ce sujet nous concerne tous, y compris en tant que collègues. Combien de fois arrive-t-il qu’une femme soit en arrêt-maladie et que, sur son lieu de travail,  ce soit terriblement banalisé … On l'oublie presque et lorsqu’un an plus tard, lorsqu’elle revient reprendre son poste, on est presqu’étonné de la voir revenir. On ignore ce qu’elle a enduré.

Le dispositif a été mis en place il y a 20 ans à Tomblaine et cela fonctionne bien. Lorsque j’étais député, j’avais présenté à l’Assemblée Nationale une Proposition de Loi visant à généraliser ce dispositif. Mais les postures et les enjeux politiques ont fait que ma Proposition de Loi a été rejetée par la droite comme par la gauche ! En effet, le système fait que si une Loi ne vient pas du Gouvernement en place, ou bien du Parti qui décide des positions dogmatiques à tenir (et il ne faut jamais sortir du rang, même lorsque votre proposition est humanisme ou de bon sens, j’ai un certain nombre d’autres exemples à donner), si elle est l’initiative d’un Député, elle ne peut pas passer. J’ai tout entendu alors sur les bancs de l’Assemblée … « Cela n’allait-il pas coûter cher aux employeurs ? » Certainement pas ! Certains députés craignant même que « certaines femmes en profitent » !!! Bref ma Proposition de Loi a été rejetée …

Quelques années plus tard, j’en ai parlé avec certains maires des plus grosses villes de l’agglomération, les invitant à faire de même dans leurs Communes, tous ont trouvé l’idée pertinente… Aucun n’a donné suite.

Je trouve cela dommage. On continue à faire de la communication : une grande course où les participantes seront habillées en rose par milliers. Je trouve cela extraordinaire, mais insuffisant.
Nous même à Tomblaine, on fait de la communication : le pont de Tomblaine sera symboliquement illuminé en rose toutes les nuits du mois d’octobre. Et puis il y a cette traditionnelle rencontre, petit-déjeuner discussion à l’Espace Jean Jaurès pour une sensibilisation au dépistage du cancer du sein, avec la participation de l’association Symphonie et l’expertise des professionnelles de la Maison de Santé Pluriprofessionnelle de Tomblaine. Chaque année c’est une belle réussite, mais on pourrait faire mieux, il me semble que chaque année ce sont souvent les mêmes personnes qui reviennent participer à ce temps d’échange et d’information. Si chacun, chacune d’entre nous essayait d’y amener une femme qui n’y est jamais venue et eput-être même une jeune femme, on progresserait …

Mais au delà de cette aspect communication, information, il est possible d’agir. Ce serait bien si les maires de l’agglomération mettaient en oeuvre ce dispositif tout simple dans chaque commune pour permettre aux femmes qui le souhaitent de se libérer sur leur temps de travail, sans perte de salaire pour un examen médical de dépistage du cancer du sein. Loin de moi l’idée de donner des leçons à qui que ce soit, mais si cette suggestion pouvait être entendue …

Hervé Féron.